Histoire d'eaux

En ces temps d'élections municipales durant lesquelles les enjeux environnementaux se devront de revenir au premier plan dans les communes littorales, il est amusant de constater que la commune de Biarritz, dès les années 30, avait une idée précise du potentiel exceptionnel de l'océan en termes d'énergie renouvelable.
Si le projet était révolutionnaire en termes d'énergie, mais problématique en termes d'aménagement du territoire étant donné que l'objectif était tout de même de développer une véritable centrale électrique à termes à Biarritz, il est toujours drôle de faire quelques parallèles temporels avec aujourd'hui où Biarritz construit une cité de l'océan déficitaire, souhaite ériger un parking gargantuesque dans la falaise et déverse ses eaux usées non traitées en cas de fortes pluies directement dans l'océan.
Il est plus que jamais d'actualité que de prendre en compte le fabuleux potentiel que concentre l'Océan pour une commune littorale. Au lieu de l'exploiter uniquement en termes touristiques pour l'alimentation de la carte postale, il serait utile d'élargir enfin le champs des possibles autour de notre matrice originelle. Le volet énergie ne serait qu'un de ceux-là.

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C'est l'histoire du laboratoire hydrodynamique marin, étrange cylindre de béton situé au pied du cap Saint-Martin où est érigé le phare de Biarritz, affrontant les assauts de l'océan et dont l'existence est aujourd'hui oubliée.


Dans les années 30, Paul Grasset imagina en effet produire de l'électricité bon marché à Biarritz en exploitant les vagues.
À compter de 1929, l'ingénieur y expérimenta « un bélier-syphon maritime à chambre barométrique » dont il avait déposé les brevets. Un procédé révolutionnaire de production d'électricité bon marché à partir de la houle maritime imaginé en pleine crise économique.

Visionnaire, il envisageait de développer, depuis Biarritz, un modèle d'usine pour l'ensemble du littoral français ainsi que les colonies.

De ce projet avant-gardiste qui aurait pu faire de la station balnéaire une immense capitale industrielle, ne subsistent que les vestiges du laboratoire et trois documents conservés aux archives municipales de la ville dont une notice technique.


Le dispositif de captation de l'eau était simple.
Les vagues pénétraient par les bouches situées au pied de la construction puis l'eau remontait le long d'un tuyau sous l'effet des coups de bélier de la houle _des clapets l'empêchant de redescendre_ avant de déboucher dans un réservoir à chambre barométrique. Elle était ensuite dirigée vers des turbines actionnant une centrale électrique également dotée de dynamos et d'alternateurs.


Une variante du projet prévoyait une remontée des eaux vers un bassin de stockage situé non loin du phare. De là, une chute artificielle alimentait une centrale électrique. Un réseau à haute tension devait permettre d'acheminer l'électricité vers la ville.

Ce procédé devait fournir « une énergie illimitée, nuit et jour, sans emploi de combustible ». Des économies considérables pouvaient ainsi être réalisées sur le charbon, principale source d'énergie de l'époque. Ce courant aux faibles coûts de production devant être utilisé « aussi près que possible des centres de consommation », cette centrale électrique devait donc induire localement tout un développement du secteur industriel.

Hélas, ou fort heureusement, les aléas économique mirent à mal ce projet. Les travaux de construction s'interrompirent dès 1931 en raison des difficultés de la crise. La Seconde Guerre mondiale mit un terme définitif à ce projet de centrale électrique à Biarritz, l'une des toutes premières expériences d'utilisation d'énergies renouvelables au monde.

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